Captain Cinéma

Un film d'Adrian Bol

D’habitude devant la caméra de Jesse V. Johnson depuis maintenant plusieurs années, Scott Adkins fait des infidélités au réalisateur et part vers une autre aventure. C’est à Adrian Bol qu’incombe la tâche d’assouvir la soif des amateurs de série B de l’acteur. Le réalisateur néerlandais était jusqu’ici connu pour ses courts-métrages, et n’avait pas réalisé de film depuis son premier en 2008 ; autant dire que ça faisait un petit moment et qu’on pouvait tout à fait se demander si Bol allait avoir les épaules pour porter ce thriller d’action.

un interrogatoire

Legacy of Lies est sur le papier un projet plus « sérieux » que les précédents films d’Adkins. De l’espionnage, de l’action, pas une once d’humour à l’horizon, de la trahison, un trauma, Adrian Bol connaît ses classiques et marche clairement sur les traces de Jason Bourne. Et si le sérieux de l’entreprise peut faire plaisir à voir, cette orientation peut vite devenir à double tranchant. On attend pas forcément d’une série B avec Scott Adkins qu’elle soit très complexe ou que le réalisateur ait des ambitions démesurées. Legacy of Lies est un peu à part dans la filmographie récente d’Adkins, dans le sens où Bol tente vraiment de tisser une histoire d’espionnage très classique mais semble parfois oublier le poids de sa star sur son récit. On se rappelle d’Accident Man, dans lequel l’aspect comic book avait du mal à cohabiter avec le « Adkins movie ». C’est également le cas ici. Cela fonctionne quand Bol veut se la jouer John Wick avec un Adkins qui empile les cadavres lors d’un deal qui se passe mal par exemple, un peu moins quand dans le réalisateur tente tant bien que mal de creuser la relation entre le personnage principal et sa fille ou d’expliquer un éternel trauma assez cliché. L’interprétation parfois maladroite y est pour quelque chose, mais on a aussi cette impression que Bol veut trop en faire, jusqu’à devenir presque prétentieux dans son approche. Ceci étant dit, le metteur en scène surprend par sa capacité à mettre en boîte son film de la façon la plus élégante possible.

Scott Adkins

Dès les premières secondes on est impressionné par la façon dont Bol réussit à mettre en valeur son décor malgré un budget qu’on imagine pas super impressionnant. Pour quelqu’un qui n’a pas réalisé de long-métrage depuis plus d’une décennie, le réalisateur semble toujours en grande forme, comme le prouve le soin apporté au découpage, à la gestion de l’espace ainsi qu’à la photographie, très élégante et bien au-dessus de la moyenne des DTV du même genre. Legacy of Lies flatte souvent la rétine, c’est un fait, et même certains aspects d’habitude pas très bien fichus dans cette catégorie de films réussissent à être satisfaisants. On pense notamment aux fusillades, pas le point fort des films avec un budget réduit (les films de Jesse V. Johnson en pâtissent à chaque fois), qui sont ici très agréables à l’œil et dont le rendu n’a rien à envier aux grosses productions. Rien d’incroyable ni de vraiment mémorable (les scènes d’action sont la plupart du temps expéditives), mais suffisamment bien fait pour tirer le film vers le haut quand les personnages font parler la poudre. Les combats ont eux aussi fait preuve d’une attention particulière. Chorégraphiés par le fidèle Tim Man, les mano a mano de Legacy of Lies sont eux aussi très bien mis en scène et font honneur à Adkins et ses opposants. Il est ainsi très décevant de voir que la deuxième partie du film en est complètement dénuée, Bol préférant mettre fin à son histoire de façon beaucoup plus calme que son début tonitruant qui enchainait les affrontements et échanges de balles à un rythme très soutenu. On ne s’ennuie jamais (il y a toujours une péripétie qui en vaut la peine), mais on reste tout de même très frustré au final.

combat dans un club

Un rendez-vous manqué donc pour ce qui avait tout de la série B qui tape bien, mais qui à mi-parcours semble avoir grillé toutes ses cartouches. On espère revoir Adkins et Bol travailler ensemble vu les jolies promesses contenues dans ce Legacy of lies, petit film imparfait mais porteur d’espoir quant au futur du genre. Allez Bol, la prochaine fois passe la seconde et ça sera la bonne.