Captain Cinéma

Un film de George Nolfi

Premier film officiel d’Apple, The Banker a débarqué sur AppleTV+ le mois dernier dans l’indifférence totale. D’abord prévu pour une sortie en janvier, le film de George Nolfi a vu ses avant-premières annulées l’année dernière et sa sortie repoussée à mars après qu’une controverse concernant le producteur Bernard Garret Jr (le fils du personnage principal) a pointé le bout de son nez. Pas de bol pour Apple donc, l’entreprise de la pomme voyant le peu de visibilité accordé au film réduit à néant (une sortie ciné était prévu pour la mi-mars, mais au vu des circonstances actuelles on se doute que ce ne fut pas un franc succès). Qu’à cela ne tienne, le film est disponible sur AppleTV+ et on était curieux de voir ce projet prendre vie avec un casting solide.

Samuel L jackson et Anthony Mackie

L’histoire de The Banker est de base pas forcément originale : le parcours du combattant de deux entrepreneurs noirs (interprétés par Samuel L. jackson et Anthony Mackie) qui essayent de faire fortune dans l’immobilier. « Essayent » ? Oui, car on est dans les années 50/60, et être noir n’est pas forcément bien vu et ferme évidemment bien des portes. Sur le papier on navigue donc en terrain connu : un rise and fall sur fond de satire sociale et de problèmes raciaux, le tout avec l’enrobage visuel de l’époque. Là où George Nolfi et ses scénaristes gagnent des points et arrivent à se démarquer c’est dans le traitement des enjeux. Si la première et dernière bobine de The Banker sont tout ce qu’il y a de plus normal, c’est dans le deuxième acte que The Banker devient très intéressant en lorgnant vers un style qu’on voyait pas forcément venir : le caper movie, ou « film de casse » en français.

Nicolas Hoult, Samuel L jackson et Anthony Mackie

On voit bien ce qui a attiré Nolfi dans ce projet : l’occasion de s’approprier un sujet qu’on connait bien pour en faire quelque chose de ludique et surprenant dans son déroulement. Ainsi, l’arrivée du personnage de Nicolas Hoult (impeccable) dans le récit fait changer la trame de trajectoire, et c’est un véritable casse qui se déroule sous nos yeux, avec ce que cela implique de plans qui se déroulent avec ou sans accros, d’imprévus, de retournements de situations et de suspense. Ce basculement dans un autre registre renverse les attentes qu’on peut avoir d’un tel film tout en dressant le portrait d’une société pas très reluisante. Et si George Nolfi n’est pas le meilleur réalisateur du monde, sa mise en scène est suffisamment solide pour mettre en valeur ses enjeux quand le scénario l’exige.

samuel L Jackson

Loin d’être une satire de plus ou un vulgaire film académique, The Banker devient alors vite trépidant, sorte de feel-good movie contenant son lot de passages tendus pour tenir le spectateur en haleine en plus d’éviter tout manichéisme facile. Même si (époque oblige) une bonne partie des personnages blancs sont montrés comme racistes, les scénaristes arrivent à contre-balancer suffisamment pour équilibrer le tout. Dommage alors de les voir retomber dans des travers pas forcément très subtiles avec une fin non seulement expédiée mais aussi un peu grossière (la faute au fils producteur ?). On en attendait plus après l’excellente deuxième partie qui promettait beaucoup, mais cela n’empêche pas The Banker d’être suffisamment recommandable pour éclairer une soirée de confinement d’un peu de soleil californien.